
Pourquoi est-ce impossible de ne pas aimer un cépage ?

Les préjugés ont la vie dure lorsqu’on déguste un vin. Plutôt que de laisser nos sens s’exprimer librement, nos idées préconçues prennent parfois le dessus. Elles peuvent concerner une appellation, un label, une méthode de vinification, un millésime ou encore une variété. Mais alors, pourquoi est-il impossible de ne pas aimer un cépage ? La réponse se trouve dans ces lignes...
Il est impossible de ne pas aimer un cépage, parce qu’il est façonné par le terroir
La notion de terroir englobe le sol d’une parcelle et le climat auquel elle est exposée. Selon la nature de la terre, argilo-calcaire, granitique, et le climat, qu’il soit méditerranéen ou septentrional, une vigne de Viognier produira un vin différent en IGP d’Oc qu’à Condrieu. Une cuvée issue de cette prestigieuse appellation révèlera une vivacité caractéristique, un nez d’une élégance rare et davantage de complexité.
De même, un Sauvignon Blanc de l’Entre-Deux-Mers, dans le Bordelais, sera plus expansif et fruité, tandis que son petit côté tranchant et sa minéralité légendaire témoigneront de la région de Marlborough, en Nouvelle-Zélande.
Il est impossible de ne pas aimer un cépage, parce que son expression dépend de l’itinéraire cultural
De la plantation à la récolte, la culture de la vigne représente un travail de longue haleine où chaque étape est décisive. L’adéquation d’un jeune plant à son terroir, la taille, les travaux en vert, les traitements, le choix de la date de vendange influencent le rendement, la qualité des raisins et, en fin de compte, celle du vin.
Un cépage productif comme le Piquepoul Blanc n’atteindra pas une maturité optimale s’il est planté sur un sol trop riche, d’autant plus s’il est taillé trop long. Ses nombreux raisins auront ainsi du mal à mûrir et engendreront des vins peu aromatiques, trop marqués par l’acidité. En revanche, si sa production est maitrisée, il saura vous régaler.
Il est impossible de ne pas aimer un cépage, parce que la vinification en façonne les caractéristiques
Prenons l’exemple des AOP Madiran et Muscadet, qui ont longtemps souffert de leur réputation, avant que les vigneronnes et vignerons ne se réinventent, notamment en modifiant leurs méthodes de vinification.
Le Tannat, cépage principal de cette appellation du sud-ouest, porte fort bien son nom. Ses baies, intrinsèquement très riches en tanins, peuvent donner des vins trop astringents. Si l’on procède à une micro-oxygénation lors de la vinification, ces derniers s’assouplissent, offrant un vin plus rond au palais.
En Val de Loire, le Melon de Bourgogne était autrefois perçu comme produisant des petits vins
à l’acidité marquée, à boire jeunes avec des huitres. L’introduction de l’élevage sur lies a complètement révolutionné leur profil. En témoignent les superbes cuvées millésimées 2001 du Domaine Luneau-Papin, qui révèlent une grande capacité de garde et s’affirment comme de véritables blancs de gastronomie.
Il est impossible de ne pas aimer un cépage, parce que quiconque peut se tromper
Certes, les cépages possèdent des prédispositions génétiques à exprimer certains arômes, à avoir des tanins plus ou moins marqués, un équilibre en bouche porté sur la fraîcheur, ou encore un degré d’alcool variable. Cependant, il faut garder à l’esprit qu’ils sont empreints du terroir sur lequel ils s’épanouissent, de la main des femmes et des hommes qui les guident, de l’effet millésime, de la qualité de leur conservation en bouteille et des conditions de dégustation.
De plus, le vin est vivant, il évolue avec le temps. Une bouteille dégustée à un moment donné pourra paraître fermée, dure au palais, avec de la lourdeur, alors qu’elle saura vous séduira quelques mois plus tard.
Même si l’analyse sensorielle suit un protocole connu sur le bout des doigts par les experts, ces derniers demeurent des êtres humains, susceptibles d’être influencés par leur état d’esprit du moment. Les winelovers
, eux, adoptent peut-être une approche plus détendue lorsqu’ils goûtent un vin, mais il reste à savoir s’ils parviennent à laisser de côté leurs préjugés.
Vous l’aurez compris, de nombreux éléments influencent l’expression d’un cépage. Tous les vins issus d’une même variété, parfois difficile à identifier, ne sont heureusement pas identiques. Il serait donc dommage de dénigrer, ou de se priver, d’une belle découverte.
L’art de la dégustation a cette incommensurable qualité, il sait toujours nous étonner. Alors, laissez-vous surprendre...
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