
Les paradoxes du Dry January

Le Dry January, consistant à bannir l’alcool du 1er au 31 janvier, est issu d’une initiative personnelle qui a rapidement atteint une échelle interplanétaire. Qu'est-ce qui explique cet engouement ? Le Dry January n’est-il justement pas antinomique à la modération ? N’est-il pas beaucoup plus vertueux de consommer moins mais mieux ? Ne risque-t-il pas d’aggraver la situation d’une filière vin déjà en difficulté ?
L’origine du Dry January
Le Dry January tire son origine d’une anglaise souhaitant se sentir mieux dans son corps, qui a su bien s’entourer et communiquer sur les réseaux sociaux.
2 ans après s’être lancée ce défit personnel afin de participer à un semi-marathon, Emily Robinson, ayant alors rejoint l’ONG Alcohol Change, lance officiellement le Dry January en 2013.
De 3000 participants inscrits pour cette 1ère édition, il est devenu aujourd’hui un mouvement mondial, suivi par des millions de personnes cherchant à commencer l'année sur une note de sobriété.
Qu'est-ce qui explique l'engouement pour le Dry January ?
Emily Robinson n’était visiblement pas la seule à ressentir le besoin de se reconnecter avec elle-même, de dépasser ses limites, d’appartenir à une communauté, de donner du sens à sa vie. Une quête certes fort compréhensible dans notre monde d’aujourd’hui
, qui aurait pu s’assouvir différemment dans une société moins hygiéniste.
Le Dry January a tout de suite bénéficié d’une forte visibilité médiatique, notamment sur les réseaux sociaux, et du soutien d’organisations de santé engagées dans la lutte anti-alcool.
Le Dry January n’est-il justement pas antinomique à la modération ?
Le Dry January, en prônant l’abstinence, ne propose-t-il pas une démarche extrême ? La sobriété se définit comme le comportement d’une personne modérée
, alors pourquoi se priver ?
Une éducation trop stricte incite souvent à braver les interdits. Les régimes alimentaires trop contraignants engendrent des risques de récidives importants.

Une privation d’alcool pendant le mois de janvier ne risque-t-elle pas d’entraîner un lâchage total le 1er février ? Ne vaut-il pas mieux consommer de façon raisonnée toute l’année ?
N’est-il pas beaucoup plus vertueux de consommer moins mais mieux ?
Certaines personnes ne boivent pas, par goût ou par soucis de santé. La consommation d’alcool n’est évidemment pas une fin en soi.
Néanmoins, pour celles et ceux qui savent l’apprécier, il est difficile d’imaginer un repas sans la magie des accords mets et vins de ne pas se retrouver à refaire le monde autour d’une jolie bouteille, ou de trinquer avec félicité.

En France, la consommation de vin a diminué de près de 70% en 60 ans. Les habitudes ont changé, on boit moins mais mieux. Alors, pourquoi revendiquer le Dry January ? Ne vaut-il pas mieux consacrer le vin à des moments conviviaux, de partage ? Choisir une bouteille qui révèle son terroir et le savoir-faire des vigneronnes et vignerons qui l’ont élaborée ?
Le Dry January ne risque-t-il pas d’aggraver la situation d’une filière vin déjà en difficulté ?
La communication tapageuse autour du Dry January incrimine trop souvent le vin alors que celui-ci ne peut pas se résumer qu’à une boisson alcoolisée.
Le vin fait partie du patrimoine de la culture française. Les vignes façonnent avec grâce nos paysages, son élaboration résulte d’une expertise merveilleuse, sa consommation témoigne d’un art de vivre, elle éveille les sens.
La filière est frappée de plein fouet par un contexte économique difficile et les effets du changement climatique, qui mettent à rude épreuve le moral des troupes.
Le Dry January participe à la stigmatisation du vin à un moment où la profession n’en a vraiment pas besoin.
A t-on vraiment besoin de suivre un phénomène de mode pouvant être perçu comme infantilisant ? Ne faut-il pas apprécier les bonnes choses en bonne compagnie selon notre libre arbitre ?
Crédits photos : iStock
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