La Loire : nouvel eldorado pour grands rosés

Loin des champs d’oliviers et des cigales, le pays de Rabelais et de la Vallée des Rois fait le pari de la gourmandise et joue une partition inédite qui décline aux quatre saisons le vin injustement cantonné aux terrasses estivales. Si le célèbre Cabernet d’Anjou, 2^ème appellation de rosé en France, tient la vedette, le climat océanique et tempéré qui borde la Loire et ses grands cépages recèlent une diversité de saveurs et de nuances qui font cavaler l’imagination et donne ses lettres de noblesse à ce vin aux 1000 nuances.

Voici 5 bonnes raisons d’adopter les rosés du Val de Loire et une douzaine de coups de cœur à tester sans attendre… Et sans se ruiner !

Une grande diversité de vins rosés

De l’Anjou à la Touraine, où le chenin et le cabernet franc ont pris la lumière, d’autres cépages historiques des climats ligériens sont taillés pour élaborer une palette de goûts explosive et singulière. Des petits raisins de gamay qui produisent en Touraine des arômes de groseille et framboise, au grolleau, inégalable pour son nez de bonbon anglais. Mention spéciale pour le pineau d’Aunis, plus confidentiel, qui nous ouvre sous des lueurs orangées un nez de poivre fraichement moulu et une bouche safranée.

Outre les AOP Touraine et Anjou qui laissent place au défi de l’assemblage de grands cépages, auxquels il faut encore ajouter le pinot noir, nos coups de cœur nous arrêtent sur des appellations sélectives qui méritent une vraie reconnaissance : Saumur et Bourgueil Rosé, remarquables expressions du cabernet franc. Ce sont des rosés secs au fruité impressionnant, avec une structure qui craint sans sourciller les longs repas à l’ombre des tilleuls, de l’entrée au dessert. Ces deux appellations, toutes petites en volume, vont vite s’inviter à la table des grands.

Nos coups de cœur : Domaine de Beaumeray (Saumur, Valentin Saulais, 8.60 €) ; Estelle & Rodolphe Cognard (Bourgueil, 8.95 €), La Robe d’Iris (Rosé de Loire, Domaine des Fontaines, 12.50 €) ; Domaines des Echardières (Touraine, 6.50 €) ; Emotions, Dumnacus (Chinon, 10,50 €)

Tendresse en bouche garantie

Outre ses rosés secs et fruités, la Loire excelle dans l’art de graduer 1000 nuances de sucrosité. Avec près de 50 % de sa production totale, l’Anjou est le berceau du rosé ligérien, version douceur angevine. Au pays du chenin et des grands moelleux, on cultive à la perfection l’art difficile des rosés tendres. Sur de belles maturités du cabernet, la fraîcheur de l’automne permet de stopper la fermentation avec le froid, pour conserver ce qu’il faut de sucres naturels. De quoi élaborer des rosés tendres et gourmands, qui ne s’embarrassent ni des saisons ni des conventions.
Les rosés et cabernets d’Anjou signent de jolis vins qui subliment autant un tajine un soir de novembre qu’un fraisier printanier. Le cabernet d’Anjou du Domaine Leblanc, élu meilleur rosé du Monde en 2023, en est l’illustration.

Notre coup de cœur : Délice d’Eté (Cabernet d’Anjou, Domaine Leblanc 8.20 €)

Effervescence et fines bulles de rosé

Les cépages ligériens sous ce climat tempéré ouvrent tous les possibles. Méthode traditionnelle, ancestrale, Pet’Nat… La créativité est sans limite pour ces cuvées à même d’accompagner une journée du midi jusqu’aux dernières heures de la nuit, et encore une fois, vraiment, en toutes saisons !

Guillaume Poitevin, Chef de Cave de la maison saumuroise Louis de Grenelle, résume ce champ des possibles tout en nuances de rose : Nous avons la fraîcheur, des cépages gourmands et taillés pour la garde, des acidités propices à des secondes fermentations, et un esprit excentrique, tout ce qu’il faut pour signer de grandes cuvées de plaisir, dixit celui qui ne vinifie pas moins de 5 cuvées en Saumur et Crémant rosé. Parmi elles, le SI Irrésistible (VSIG), une méthode ancestrale élaborée autour du cépage grolleau, porte bien son nom. Une fine bulle primeur, qui transporte les teintes chaudes de l’été sur les tables de Noël. Extra.

Nos coups de cœur : SI Irrésistible (Caves L. de Grenelle, 9.95 €) ; Désirée Anne (Crémant de Loire, Bois Mozé, 12 €), Belle (Crémant de Loire, Le Petit Clocher, 11.95 €)

Gastronomie et vins rosés

Si le cabernet franc sait faire de grands rouges à vocation gastronomique, des vignerons ont à cœur d’appliquer la même approche pour les rosés, car le rosé est un vrai vin qui mérite d’être traité comme tel, avec sérieux défend Antoine Poupard, le directeur d’exploitation du Domaine La Petite Roche. Ce tempérament déterminé croit depuis longtemps dans la capacité de ses terroirs d’Anjou à produire de grands rosés de gastronomie. Ici, on va moins rechercher le fruit et l’arôme primaire que la matière et la texture en bouche. Les cuvées Origine et l’Angevin, vinifiées en cuve ovoïde et en fût de chêne et bois rose, sont la preuve par l’exemple. Les plus sceptiques en seront pour leur frais : à l’aveugle, impossible d’imaginer qu’il s’agit d’un rosé : la révolution fait son chemin.

Notre coup de cœur gastronomique : L’Angevin (Rosé de Loire, La Petite Roche, 13.50 €)

Un style propre et atypique

Les rosés ligériens ont leur propre style. La couleur d’abord, qui assume une intensité colorante plus franche, et se plaît des teintes framboise aux orange les plus appuyés.
De quoi boire la vie en mille rose, sans filtre, mais pas sans trouver les chemins de la modération. Les rosés tendres sont le terrain privilégié des vins naturellement bas en alcool. Avec Baladelle et Sans Pépin - en petit flacon individuel de 20 cl ! - , on assume sans complexe des vins de randonnée champêtre à moins de 10 % d'alcool.
Au domaine des Trottières, le bas degré naturel (8.5 %) est érigé en étendard d’une cuvée à la robe profonde et à la bouche qui réussit l’amalgame de la gourmandise et de la légèreté. Très réussi.

Nos coups de cœur : 8 ½ (Rosé d’Anjou, Domaine des Trottières, 7.90 €) ; Sans Pépin (VDF, Les Vignobles Edonis, 9.20 € les 4 x 20 cl) ; Baladelle (Rosé d’Anjou, Dumnacus, 5.75 €)

Une large diversité qui laisse place à tous les talents, une palette de couleurs et de sucrosité inimitable, des terroirs et un climat taillés pour la fraîcheur et la légèreté : la Loire, grand vignoble réputé pour ses blancs et ses fines bulles, démontre combien elle est armée pour écrire aussi son avenir en rose, à des tarifs pour l’heure aussi doux que ses cabernets….

Les coups de cœur : sélection réalisée à l’aveugle sur une pré-sélection de 72 cuvées dégustées selon 3 classes de positionnement : sec, bas alcool, effervescent.

Crédits photos : Léo Gabillard

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